Le Pacte des Naufrageurs
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Le Pacte des Naufrageurs

Prenez la mer et venez partager l'une de nos aventures barbaresques, dans le tonnerre et la fureur
 
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 Le renouveau

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Jess

Jess


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Date d'inscription : 13/07/2018

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MessageSujet: Le renouveau   Le renouveau Icon_minitimeVen 13 Juil - 18:54


Regarde-moi. Observe-moi attentivement. Je sais que je cause l'effroi. Je le vois dans tes yeux. Tu as demandé à contempler mon visage, le voici.
Oui, me voici devant toi, mon cher mari, me voici enfin à visage découvert et je sens, je sais que tu regrettes déjà ta curiosité, que tu te détournes et que tu cherches à éviter mon regard.
Ce sont nos yeux, en effet, qui choquent au premier abord, j'en suis consciente. Ils sont les miroirs de nos âmes et la mienne est chargée de colère et d'amertume, la mienne est obscure comme un puits sans fond. S'y plonger, c'est plongé dans l'abîme. Tout le monde n'en a pas la force, tout le monde ne supporte pas le regard que te rend l'abysse que tu contemples... vert, mes yeux, vert comme ce serpent que tu craints tant, brillants comme des perles, des joyaux morts et figés. Gris, parfois, en de trop rares instants quand tout s’apaise, gris de plomb et d'anthracite : c'est le seul moment où ils retrouvent un soupçon de la clarté d'autrefois, paraît-il.
Je n'y comprends moi-même guère, à trop fuir mon reflet et mon image qui me dégoûte. Car, comme chacune de ses esclaves que tu as touchés, je porte le souvenir et la marque, je suis un vestige, une épave, un naufrage. Pourtant, je brûle.

Je suis petite ? Tu me domines de la tête et des épaules. À n'y prendre point garde, on me prend souvent pour une enfant, pourtant n'est-ce pas ce que je suis censé être pour toi ? Un peu courbée, voûtée sous un invisible fardeau ; cela m'arrange et j'affecte à accentuer cette disgrâce, parce qu'elle me dissimule et fourvoie l'ennemi, toi et tes hommes.
Et puis, qui se défierait d'une chétive créature ? Ah, sots, ah, rats que vous êtes, si vite floués.

Maintenant, je vais renaitre, je serais immense ! Mon sang pourri avait dilué ce privilège, nous avons gagné en taille comme nous avons perdu en tout, en beauté, en prestance, en élégance... Nous étions fiers et élancés comme des bouleaux, pâles et fins comme leurs ramilles frissonnantes, tous façonnés d'eau claire, d'argent pur et d'or.
Tu as osé nous transformer en ruine. Nous avons décru comme meurent les grands arbres, rabougris et rongés, nous avons courbé nos échines trop altières et nos os érodés se sont amoindris jusqu'à nous donner l'allure que tu me vois à présent.
Le plus insupportable n'est pas notre laideur. La mienne, je m'y suis faite et même si elle me soulève le cœur, je n'y prend plus garde. Non. Ce qui me révulse, c'est de te voir traquer le moindre parti de mon âme, je suis ta femme, je suis ta fille, je suis ta chose.
Les vestiges, justement, ce qui s’étiole encore et s’attarde dans nos corps amoindris, ce que l’on distingue derrière la ruine, comme on devine dans l’arbre mort le vert baliveau qu’il était, ils sont partout.
C’est subtil, mais je capte dans le regard de certains comme une admiration passagère, quand ils croient percevoir, l’espace d’un instant, ce qui fut et ne sera plus jamais.
Certains s’arrêtent au visage de jouvencelle funèbre que j’arbore et ne vont point plus avant. Je me prends à le surprendre, moi aussi, de temps à autre et cela est pire que tout : pire que la ruine, pire que de voir quelle horreur indigne nous sommes devenus.
À cause de toi. Mais c’est cela qui nous rend beaux à nouveau, parfois ; cela qui nous rend dérangeants aussi, car c’est comme contempler le cadavre d’une accorte personne : c’est ce que je suis, c’est que nous sommes tous.

L’attrait est là, encore, sous-jacent, on le traque et on le débusque au détour d’un regard, l’amande de mes grands yeux, le contour d’une bouche fine, la gorge de cygne, la taille délicate, la stature altière qui se redresse dans un effort.
Mais la ruine menace, la ruine ronge, la pourriture flétrit les chairs vives et retrousse les lèvres sur les dents aiguës, les orbites se creusent et noircissent, le teint vire à la grisaille poisseuse. La coexistence contre nature de la beauté et de l’horreur, voilà comment cher père tu m’as transformé.
Je me tiens sur le seuil, là où la peur rejoint le désir. Je vais t’ouvrir comme un poisson, vider tes tripes sur ce navire maudit. Tu m’avais caché l’existence de mon frère…. Lui aussi, l’a tu travailler à ton image ? L’as-tu pourri jusqu’a que sa folie le contrôle. Là tu seulement aimé ?
Est-ce je te plairais toujours cher père quand je fendrais tes bourses en deux avec mes disgrâces de vieille bâtarde abandonnée par toi.
Mais je m'égare et je te vois me contempler de nouveau. Ton envie de me toucher s'est estompé ? Quel dommage que tu es perdu tes doigts. Tu ne pourras plus jamais toucher quelqu'un. Ton regard effrayé ne s'attarde plus sur mon visage de cadavre noyé.
Mon entaille sur ma joue, celle que tu m'as affligée lorsque tes désirs te contrôlaient, te fait horreur, n'est-ce pas.
Je suis le cadavre vivant, parlant, chantant, le tombeau que tu as créé fils de chien. Je suis leur fantôme. Ce que nous fûmes, tu l'entrevois en moi. Alors, me voici. Regarde, à travers moi, la splendeur et la ruine, la chute, la déchéance ce qui reste de nous. Contemple ton œuvre, regarde ta fille, le monstre, avant qu'il ne t'avale toute crue. Repait en, voilà ta récompense !

Jess sortie de la cabine, en sang tenant fermement deux petits orbes entre ses doigts.

"Dis à tes hommes de brûler ce putain de navire avec tout ce qui c’trouve dedans. Ned..."

On pourra entendre un cri strident, des injures sortir de la cabine.

"Gamine, je te maudis, je maudis ma descendance vous crèverez t…." Un coup d’épée l’empêcha de continuer.

"Bordel, j’espère que tu gémis moins que ton paternelle ? Bienvenue dans Le Lily, ma belle, Tharouk va t’donner de quoi bouffer" jetant le bout de langue avec ironie derrière lui avant de partir donner ses ordres à ses hommes. Le Capitaine Payne secoua la tête en voyant la petite, se disant que c’était un gâchis de l’avoir laissé moisir dans une des cales*

Ainsi le capitaine Kingster mourut, brûlez vif dans son propre bateau avec quelques-uns de ses hommes.  Jess savourait le spectacle des cris, les hurlements s'ajoutant à celui-ci la faisaient enfin sourire. Elle écrasa les yeux de son père, entre la paume de ses mains, les pressants avec rage.

"C’est moi qui maudit ton âme sale chien ! Jamais tu ne rejoindras les abysses. J’espère que mon frère ne te ressemble pas. Puisse-t-il avoir une belle vie sur les flots. Si ce n’est pas le cas. Je viendrais lui aussi le broyer..
."

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